Le fléau de la fast fashion, SHEIN

Durant le premier confinement, une marque pourtant créée en 2008 prend rapidement du galon. L’argument de vente est énorme : des prix minuscules pour une diversité d’articles gigantesque. C’est le début de l’explosion de SHEIN, une entreprise chinoise de vente en ligne qui tourne aujourd’hui avec près de 500 nouveautés par jour. Ici nous ne parlons pas de « fast-fashion », mais « d’ultra fast-fashion ». Sans surprise, un véritable désastre écologique avec des conditions de travail inhumaines et une qualité de vêtement médiocre, voire dangereuse.

Pourtant, les vidéos « Haul » de la marque pullulent sur YouTube, et nombreux sont ceux qui continuent d’afficher fièrement leurs trouvailles sur les réseaux sociaux. Des cartons entiers de vêtements, dont un quart n’a même pas été commandé de la bonne taille, dépaquetés avec engouement par les influenceurs.

Mais les problématiques liées à la fast-fashion ne datent pas d’hier, des marques comme ZARA, NIKE, GAP, PUMA ou H&M ont d’ailleurs été accusées de profiter du travail forcé des ouïghours et des appels au boycott ont été lancés à plusieurs reprises. Alors pourquoi SHEIN est davantage pointé du doigt en ce moment ?



Une marque qui n’a jamais bénéficié au consommateur



Les prix imbattables peuvent, certes, être véritablement tentant, d’autant plus que les collections sont très au courant des nouvelles modes et tendance, pire, elles les prédisent. Il faut néanmoins garder à l’esprit deux choses : premièrement les prix des vêtements ont énormément augmenté avec sa récente popularité, et cela pour la même qualité d’articles.

Par ailleurs, beaucoup de leurs produits sont de véritables copier-coller d’autres marques de fast-fashion comme ZARA. Le pire, c’est que les internautes ne dénoncent pas la transgression de la propriété intellectuelle, mais au contraire se réjouissent de cette alternative moins onéreuse… Si l’objectif du consommateur est d’exprimer son identité par son style, le procédé est tout de même moins reluisant.



« Acheter SHEIN c’est participer à un système d’exploitation désastreux »


Autre argument de taille en défaveur des consommateurs, la qualité désastreuse des textiles ne s'arrête pas seulement à la médiocrité, mais comporte des agents toxiques pour celui qui les porte. En novembre dernier, l’organisation Greenpeace a publié dans un rapport intitulé « Les dessous toxiques de la mode » le compte-rendu de ses expériences sur plusieurs commandes de vêtements.

Résultat, plusieurs marques, dont SHEIN, ont été mises en cause vis-à-vis de substances chimiques susceptibles de « provoquer des cancers et d'agir comme perturbateurs endocriniens, déréglant le fonctionnement hormonal et impactant les fonctions reproductives » (Le monde).

La mode éphémère et les déchets plastiques encombrent une décharge à Accra au Ghana, le 07 février 2022 (MUNTAKA CHASANT/SHUTTERSTOCK/SIP / SIPA)

La bête noire des travailleurs et de l'environnement

Le site chinois fait aujourd’hui partie des cinq plus gros vendeurs de mode en France, avec un prix moyen pour un vêtement de 7,40 euros, soit deux fois moins que le reste de ses concurrents. Pour obtenir ces prix , pas de surprise, les employés sont très largement sous-payés, tous rémunérés à l’unité et évidemment sans contrat. Au début 2022, des chercheurs de Public Eye ont rencontré des employés qui travaillaient 75 heures par semaine, soit presque le double de la législation chinoise.

« Ces travailleurs ont seulement un jour de congé par mois, voire aucun congé, donc travaillent sept jours sur sept. Cela s’appelle de l’exploitation » expliquait Nayla Ajaltouni, membre du collectif Ethique sur l’étiquette à à France info.



Les prix bon marché nous font croire qu’ils entraînent des économies dans la poche des consommateurs. Mais cette vision est terriblement étroite et uniquement véridique sur du court terme, puisque en tant que citoyens du monde nous finirons tous par payer le coût externe de cette production non durable. Car ce sont bel et bien des vêtements qu’on jette – puisqu’ils sont à moindre prix le regret de l’acheteur est quasi-nul – avec une absence de longévité causée par une qualité médiocre, et qui se muent très vite en des tonnes de déchets dont on se débarrasse dans des décharge à ciel ouverts bien loin de notre pays.

Une marque inclusive ?

Une des « qualités » mises en avant par la marque concerne sa large diversité de tailles et de tolérance vis-à-vis de ceux que la mode a trop souvent oubliés. Une qualité vantée par plusieurs sites comme « The body optimist » ou « madame figaro », qui ne font pas une seule mention des traces de plombs dans les vêtements ou de l’exploitation des employés…

Alors faire l’éloge d’une marque controversée parce qu’elle montre enfin des teintes d’inclusion, est-ce raisonnable ? Ne devrions-nous pas plutôt nous insurger contre les enseignes de slow fashion qui semblent bloquées sur des one size ? Rappelons également que les consommateurs problématiques de SHEIN ne sont pas forcément ceux qui souhaitent renouveler leurs garde-robes avec des moyens financiers très limités, mais plutôt cette majorité de clients qui dépensent 100 à 200 euros par mois en achetant des cartons entiers dont ils garderont à peine la moitié.


Comment lutter concrètement ?

Des alternatives, il y en a. Slow fashion, vinted, tris, prendre le temps de donner ses vieux vêtements, payer plus pour garder plus. Et surtout, connaître ces marques nocives et en garder la consommation dans un cadre limité.

Que ce soit la Fast fashion avec Zara, Mango, Stradivarius, Bershka, ou encore l’Ultra Fast Fashion dont fait partie SHEIN, mais aussi Boohoo, Pretty Little Things ou Missguided, il n’est pas obligé de s’imposer une rigidité sévère quant à notre consommation de ses marques… Néanmoins, il devient vital que ce genre d’achats demeure dans la case étroite de l’exception. Les jeunes, premiers consommateurs de SHEIN, sont la cible de ce genre de marques, et il est donc d’autant plus nécessaire de se sensibiliser.



Pour aller plus loin :

https://madame.lefigaro.fr/style/place-a-une-mode-plus-inclusive-avec-sheinforall-20220314

https://www.youtube.com/watch?v=X94vQiHkLxU

https://www.oxfamfrance.org/agir-oxfam/fast-fashion-et-slow-fashion-impacts-definitions/

https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/01/05/les-coulisses-peu-reluisantes-de-shein-nouveau-geant-du-pret-a-porter_6108229_3234.html

https://www.jemerecycle.fr/lultra-fast-fashion/





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