Recommandations culturelles du mois de décembre
Tous les mois (ou presque) Weshculture vous informe de l’actualité culturelle variée de la capitale afin de mettre en avant ses meilleures découvertes !
En passant par les pièces de théâtres, les lectures, expos, films, podcasts et reportages, toute la diversité de l’actualité culturelle y passe !
Anora : Le cendrillon des temps modernes
Film
Réalisé par Sean Baker et sorti le 30 novembre 2024
Anora, le nouveau film de Sean Baker, raconte l’histoire d’une jeune travailleuse du sexe de Brooklyn dont la vie bascule lorsqu’elle rencontre Ivan, le fils d’un oligarque russe, qu’elle épouse dans la foulée. Mais lorsque les parents d’Ivan découvrent leur union, ils débarquent à New York pour tenter de faire annuler le mariage.
C’est une comédie surprenante, comme on en voit rarement décrocher la Palme d’or au festival de Cannes. Ce cendrillon des temps modernes, nous plonge dans l’univers du monde de la nuit mais également de la frénésie qui l'accompagne. Sean Baker s’est encore une fois attardé sur une Amérique marginale, comme on avait pu le voir dans ses précédents films (The Florida Project notamment). On se retrouve dans un univers artificiel où le “prince charmant” n’est autre qu’un enfant gâté qui dépense l’argent sans compter.
Sean Baker, en plus d’être le réalisateur, est également le chef monteur du film. On remarque en le visionnant, qu’il est marqué par un rythme assez esthétique, où les scènes de sexes et de fêtes se succèdent puis s’arrêtent brutalement comme pour montrer que le plaisir perçu dans cet univers superficiel n’est que temporaire.
Mickey Madison, que l’on avait déjà pu apercevoir dans quelques films (Scream), irradie sur le grand écran en incarnant parfaitement son personnage : une jeune femme sensuelle qui se veut forte mais dont on perçoit une certaine vulnérabilité.
Anora, c’est la comédie à laquelle on ne s’attendait pas !
Encore à l’affiche au cinéma
Par Eva Launay, le 22/11/24
La modernité s’invite au théâtre avec Big Mother
Pièce de théâtre
Une pièce de Mélody Mourey, créée en février 2023 au théâtre des Béliers
Ce thriller brillant nous immerge dans la rédaction du New York investigation et de quatres de ses journalistes les plus importants. Ensemble ils vont faire face à un scandale qui frappe le président des Etats-Unis et enquêter sur un organisme concurrent qui menace la liberté de la presse, mais tout ne se passe pas comme prévu…. Derrière la référence explicite au roman dystopique de George Orwell, la pièce explore les thèmes de la désinformation, de la liberté journalistique et de la viabilité de la démocratie dans une société fictive ultra-technologique, qui résonne avec notre réalité.
La pièce se distingue par sa mise en scène incroyablement contemporaine. Le spectateur tout de suite captivé par le rythme effréné qui agite la rédaction dans un moment de tension maximal. Musiques, lumières et effets scéniques accentuent cette impression de mouvement permanent. L’ensemble des décors et des personnages se métamorphosent en continu, donnant au spectateur l’illusion que l’histoire avance vite. De plus, les 4 acteurs dont les rôles alternent, interprètent les émotions fortes que ressentent les personnages ainsi que les traits d’humour voulu par la metteuse en scène.
Cette pièce innovante sur tous les points de vue n’en demeure pas moins porteuse de messages forts concernant notre régime politique et les informations qui y circulent.
Représentations jusqu’au 28 février 2025 au Théâtre des Béliers (18ème)
Par Julie Rolland, le 22/11/24
Monsieur Aznavour : la ténacité du succès incarnée
Film
Réalisé par Mehdi Idir et Grand Corps Malade et sorti le 23 octobre 2024
Ce biopic intéressant retrace la vie du célèbre chanteur-compositeur français, Charles Aznavour. Le déroulé de sa vie est une occasion pour le spectateur de s’immerger dans un contexte historique et d’en analyser ses évolutions. Ce film nous informe aussi du caractère tenace de Charles Aznavour, qui va dédier sa vie au travail et à l’écriture de ses chansons, dans l’objectif de se faire connaître. Il entre dans une quête insatiable vers le succès, n’étant jamais satisfait de sa réussite. Le film met l’accent sur sa difficulté à être présent pour sa famille, et notamment pour ses 6 ans issus de 3 histoires différentes. Sa relation avec Édith Piaf est aussi très explorée. Elle est d’abord pour lui un tremplin, en faisant ses premières parties cela lui permet de se faire connaître. Mais son emprise devient trop forte et il doit arrêter de travailler avec elle pour se réaliser vraiment en tant que tel.
Enfin, l’histoire d’Aznavour est l’histoire du peuple arménien, de ses difficultés d’intégration en France et de la menace des exportations durant la 2nd Guerre Mondiale. Charles Aznavour incarne l’idéal de la réalisation professionnelle par le travail acharné. Même si on conçoit que le fait de vivre en plein cœur de Paris, parfois dans des endroits insalubres avec sa famille, décuple ses opportunités dans la France fragilisée des années 50.
Le film utilise les chansons les plus connues d’Aznavour et installe un univers musical captivant, redonnant vie à ses plus gros succès comme à ses plus grandes peines.
Encore à l’affiche au cinéma
Par Julie Rolland, le 23/11/24
La palpitante intrigue de L’heure des assassins
Pièce de théâtre
Mise en scène par de Julien Lefebvre et créée le 18 octobre à la Comédie de Paris
Plongez au début du XXe siècle pour une palpitante intrigue policière dans un huis clos au cœur d’un salon d’un théâtre londonien. Après le succès de ses pièces Le cercle de Whitechapel et Les voyageurs du crime, Julien Lefebvre remet en scène les personnages d’Arthur Conan Doyle ( père de Sherlock Holmes), Bram Stoker (auteur de Dracula) et du dramaturge Bernard Shaw, dans un troisième volet riche en rebondissement. A retrouver à la Comédie de Paris, vous allez être transporté, grâce à des décors réalistes, dans le temps (et l’espace) à deux pas du Big Ben de l’ère post-victorienne.
Le soir du réveillon, à l’occasion d’une représentation de la pièce Peter Pan, la haute société se réunit dans le salon privé du propriétaire des lieux : le richissime Philip Somerset. Alors que les six invités dégustent le champagne et les petits fours, attendant patiemment le début de la pièce ; ils sont [cependant : juste pour les posts réseaux]alertés d’une tragique nouvelle : Monsieur Somerset est mort. Pire encore, il a été empoisonné. La porte du salon londonien est cependant fermée. Ça ne veut dire qu’une seule chose : le meurtrier est [alors] dans la salle. Dans un huis clos palpitant, les mobiles et les alibis des six personnages vont être passés au crible. Chaque personnage va être respectivement suspecté. Intrigue familiale et politique sont de la partie. Les retournements de situations, tout comme l’interprétation des personnages, sont au rendez-vous. Teinté d’un humour à la british, l’enquête menée par Conan Doyle élimine les faux-semblants pour finalement sonner, dans un final inattendu, l'heure des Assassins.
Représentations jusqu’au 5 janvier à la Comédie de Paris (9ème)
Par Thomas Frontenac, le 24/11/24
Majola ou le procès par le média
Pièce de théâtre
Mise en scène par Caroline Darnay créée le 25 septembre au théâtre Essaïon
Cette pièce met en scène l’interview historique de la femme d’un nazi responsable de la mort de milliers de juifs pendant la seconde guerre mondiale. Deux journalistes américains décident de collecter des témoignages sur l’illustre personnage de Schindler et se retrouvent à interroger Irène Kalder, appelée par son feu mari Majola qui signifie “petite reine”. Cette interview prend vite la tournure d’un procès à l’encontre de celle qui incarne la figure de la spectatrice dans l’effroyable orchestration nazie. Un conflit fait irruption entre cette ancienne épouse qui ne vit que par le prisme de l’illusion de son innocence et le journaliste américain qui est un ancien combattant. Les rôles s’inversent et c’est Majola qui va l’interroger sur sa culpabilité dans la mort de victimes civiles de la guerre.
Cette pièce fondée sur un ensemble de faits réels aborde la question compliquée de la subjectivité de responsabilité guerrière. A travers les personnages sont incarnés les camps adverses des Alliés et de l’Axe, ainsi que la conflictualité qui les oppose restituée par l’animosité insupportable et permanente entre l’interrogée et le journaliste. Est aussi posée la question de la responsabilité individuelle lorsque que l’individu ne forme qu’un maillon dans schéma plus vaste et qu’il se sent déterminé par des contraintes qui le surpassent. C’est la cas de Majola, qui tente de se défendre des accusations qui pèsent sur elle en affirmant avoir aidé les détenus juifs en leur donnant de la nourriture ou même en ayant inscrit sur la liste de Schindler deux détenues, leur sauvant ainsi la vie. Mais pour autant, le malheur du peuple juif lui permet de s’enrichir.
La pièce Majola, captivante par l'incroyable jeu d’acteur des trois protagonistes, est véritablement instructive sur l’histoire de la documentation de l’après-guerre. Enfin elle amène à se poser des questions sur la façon de se raconter collectivement l’histoire des peuples par la vaste entreprise qu’est la mémoire.
Représentations au théâtre Essaïon jusqu’au 19/12/24
Par Julie Rolland, le 02/12/24